Trois priorités pour libérer la recherche | Les Echos

du 17 juin 2022 au 17 septembre 2022

Connexion plus étroite entre science et santé, réforme de l'évaluation des chercheurs, clarification du rôle des grands établissements scientifiques publics… Le patron de l'institut Imagine avance quelques pistes pour libérer la recherche.

Stanislas Lyonnet

Par Stanislas Lyonnet (Directeur de l’Institut des maladies génétiques Imagine)

Publié le 10 juin 2022 à 14:00Mis à jour le 10 juin 2022 à 14:04

Si la science ne doit pas être politisée, les conditions de la recherche relèvent bien du politique. Dans le contexte actuel, risquons humblement trois propositions, à l'usage de tout nouvel acteur de l'exécutif qui souhaiterait s'en emparer. Suggestions inspirées de l'expérience de deux ans de pandémie, accélérateur des travers mais aussi des valeurs de notre système : d'un côté, suspicion et discrédit ; de l'autre, inventivité et efficacité.

D'abord, une alliance intime entre science et santé, dans un monde de la recherche qui cloisonne encore trop ces domaines. On peut y arriver par des alliances choisies entre public et privé. L'idée n'est certes pas nouvelle, le modèle existe, mais il doit être sérieusement renforcé. Il est certes incarné par nos sept instituts hospitalo-universitaires (IHU), bientôt plus nombreux on l'espère, mais surtout par près de 35 projets de recherche hospitalo-universitaires (RHU), qui, grâce aux investissements d'avenir ont dressé presque involontairement une carte de l'excellence française en recherche biomédicale. C'est là qu'il faut investir plus encore.

Instituts thématiques

Parlons aussi de la reconnaissance de la qualité des scientifiques et de leurs projets. L'Etat a fourni de gros efforts en matière d'attractivité, mais il doit faire davantage confiance à ceux qui passent parfois plus de temps à rendre des comptes qu'à réaliser des expériences. Développons une évaluation aussi attachée à sanctionner vraiment les errements ou l'apathie, qu'à encourager fortement les jeunes énergies en leur laissant plus la bride sur l'encolure.

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Enfin, nos grands établissements scientifiques publics (CNRS, Inserm…) sont à la fois opérateurs de recherche et agences de moyens. Il faudrait clarifier leur rôle et redéfinir leur périmètre : indispensables pour organiser des plans nationaux ou en soutien à l'émergence, ils le sont moins quand il s'agit du développement rapide de projets innovants qui exigent des instituts thématiques flexibles et agiles, proches de l'autonomie.

Respecter l'initiative des chercheurs là où ils font la preuve de leurs qualités, au prix d'une farouche évaluation, voilà qui redonnerait vigueur et confiance à la démarche scientifique : sortons de la défiance pour libérer la recherche ! Et, promis, prochain billet, cette fois-ci on parle de génétique…

Stanislas Lyonnet

Publié le 17 juin 2022